Rafael Gerlach: Mirror Cabinet
Pour sa deuxième exposition avec la Galerie Chenus Longhi, Rafael Gerlach a souhaité reculer encore plus les frontières de son vocabulaire plastique, fortement inspiré des lieux abandonnés, lieux d'expression et d'inspiration du graffiti depuis des décennies. Pas étonnant quand on sait à quel point la notion d'éphémère est centrale dans l'approche qu'ont les artistes urbains de leur processus artistique. De ces sites hors du temps et de l'espace, naît une poésie étrange, en correspondance avec la beauté décadente de cet environnement. De cette décrépitude - objets laissés à l'abandon, matières qui se pâtinent et s'effritent au sol, aux murs, au plafond - naît une esthétique du chaos.
C'est cette idée de strates temporelles, de couches de matières, de couleurs qui passent, de rouille qui apparaît, que l'on retrouve dans l'approche picturale de Rafael Gerlach. C'est une articulation entre passé, présent et futur, prenant la forme d'aditions et de soustractions de couches de matière. Le layering, que l'on pourrait maladroitement traduire par le mot de superposition, évoquerait facilement dans nos esprits le palimpseste, et génère ce langage totalement émotionnel que l'abstraction confère aux tableaux de Rafael Gerlach. Ce palimpseste est à l'image d'une personnalité humaine, forgée au fil des années par une somme d'expériences vécues, bonnes comme mauvaises, et de souvenirs enfouis sous la poussière de nos inconscients. On retrouve ainsi l'idée — omniprésente dans l'histoire de l'art — de la toile comme miroir de l'âme et fenêtre vers l'inconscient, avec les layers de peinture comme autant de couches de poussière occultant notre propre reflet dans la glace. En nettoyant et dévoilant certains pans de sa surface, on arrive à renouer avec soi-même et à mieux se connaître. C'est ce que confère le titre de l'exposition Mirror Cabinet.